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MOOC @ddict? - webinaire 4 - Fabriquer l'addiction ? - bonus

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: Bienvenue à ce bonus de la semaine quatre. On va se poser quelques questions supplémentaires. Des questions qui sont venues de la salle elle-même à à la pause. Finalement on a beaucoup parlé d'usage addictif, usages vraiment très problématique qui conduisent à une souffrance et à aller consulter une démarche de consultation, mais qu'en est-il des usages excessifs? Puisque, selon certains spécialistes, il y a vraiment très très peu d'addicts, mais pas mal, finalement, de gens qui sont dans un usage qualifié d'excessif, c'est-à-dire du trop de l'excès. Donc je vais vous demander de réagir là dessus, sur cette frange finalement de joueurs excessifs.
: Alors pour moi il y a un problème fondamental, c'est la définition de l'excès, et la définition de ce que c'est qu'un joueur excessif. Et n'étant pas clinicien, n'étant pas psychologue, je n'ai pas définition objective de ce termes là et du coup je suis un peu en en mal de de répondre à cette question. C'est-à-dire par rapport à quoi est-ce que le jeu est excessif? Par rapport à quels critères? Par rapport à quel standard est-ce que il est excessif?
: Alors je suis pas clinicien non plus mais peut-être qu'on peut faire le parallèle avec l'alcool, où sans à être addicts à l'alcool on peut quand même savoir qu'on a trop bu.
: Oui mais alors typiquement, le fait d'avoir trop bu, d'une certaine manière, fait partie du plaisir de l'alcool. D'un point de vue strictement empirique, je veux dire il y a des usages de l'alcool dans lequel le principe est justement d'avoir juste un petit peu trop bu pour être dans l'état dans lequel on est, c'est-à-dire en fait un petit peu ivre euphorique etc qui fait partie du plaisir de l'alcool. Donc d'une certaine manière, une certaine dose d'excès fait également partie, j'imagine, du plaisir du jeu video. Tout ça tout ça pour dire, et je pense que c'est important, c'est que moi je ne sais pas si j'ai rencontré des joueurs excessifs ou pas parce que, dire qu'un joueur est excessif pour moi relève d'une dénomination normative de ce joueur, d'une désignation normative de sa pratique, désignation que je m'interdis de faire. C'est-à-dire que j'étudie les gens et ce qu'ils font, et j'essaie de qualifier ce qu'il font, c'est-à-dire en quoi c'est différent de ce que font les autres. Mais alors par contre, si je me mets à dire que quelque chose est excessif, ça veut dire que je prends parti par rapport à sa pratique et que je dis, ce qu'il fait là il ne devrait pas le faire, c'est mauvais pour lui etc, qui est un jugement que je me refuse à porter, encore une fois parce que mon principe c'est de décrire la manière dont les pratiques se font. Des joueurs engagés par contre oui j'en ai vu, mais encore une fois parce que la notion d'engagement permet de désigner qualitativement ce que fait une personne.
: Oui c'est une question nécessairement difficile. Elle revient en même temps sans cesse sur le forum et et ceux qui, il y en a un certain nombre qui ont commencé le mot qu'avec un peu de retard et qui sont actuellement en train de dérouler les deux premières semaines, ramènent à nouveau cette question des usages excessifs. C'est-à-dire que, à la fois il est évident qu'on ne peut pas être dans une visée normative, et d'ailleurs on l'a dit dès le début, l'excès fait partie de la vie humaine et heureusement. On peut pas pathologies les conduites d'excès. Et en même temps cette question elle revient. Alors pourquoi elle revient? Probablement elle revient comme on l'a dit tout à l'heure de la part de parents qui sont inquiets par rapport aux conduites de leurs enfants, mais pas seulement. Et d'autres ont posé la question par rapport addiction, passion etc, il était question de temporalité, de répercussion à long terme etc. En addictologie on on parle souvent d'usage à risque, et quand on parle d'usage à risque on le fait souvent par rapport à des éléments de contexte ou de terrain, c'est-à-dire par exemple par rapport à l'alcool c'est vrai que si on est au volant, on va parler d'usage à risque. Ou si on prend des médicaments psychotropes qui ont un impact, ou si il s'agit d'une femme enceinte on est dans une situation où effectivement le risque est assez facile à cerner. Pour le jeu vidéo c'est beaucoup plus difficile, ou pour un objet numérique sur lequel on est accroché pendant un temps important, quel va être le le risque, si on va dire, j'ai envie de dire, mais c'est aussi très normatif quand même, si on arrive à préserver la majorité des activités dans lesquelles on était engagé au moment où on a commencé l'activité, et a a priori pour lesquels on n'avait pas d'aversion ni l'envie d'y mettre terme, on peut considérer qu'il y a pas de risque vraiment. Donc si on garde la capacité à se poser la question de l'activité qu'on fait, et de décider de la poursuivre. Si on garde sa capacité de prise de décision pour continuer, il y a pas d'excès. Peut-être que dans certains cas, c'est peut-être une discussion qu'on va pouvoir avoir après, peut-être que dans certains cas justement cette capacité à pouvoir rester décisionnel par rapport à son comportement s'évanouit un petit peu. Voilà une question. Peut-être pour mon voisin de droite.
: Je sais que je vais me faire rattraper sur la question d'après donc je vais faire deux en un en fait.
: Donc la question d'après portait sur le fait se demander si finalement le but ultime d'un concepteur n'était pas évidemment d'avoir des joueurs addicts parce que ça c'est ça c'est pas bien, mais d'avoir le maximum d'usagers excessifs.
: Voilà j'ai eu au moins trois minutes pour réfléchir à la réponse que j'allais pouvoir apporter à cette question. Je remercie pas du tout les gens dans l'audience de l'avoir posée. Non mais si si au contraire, c'est une question qui me paraît fondamentalement intéressante. La première réponse se serait de dire bah oui bien sûr, on crée un produit qui doit être consommé, notre objectif c'est qu'il soit consommé au maximum. Exactement comme d'autres médias en fait. Exactement comme un film, comme un livre, comme quelque chose qui se consomme, un produit créatif, culturel, numérique qui se consomme ben l'idée c'est qu'il soit consommé par le plus de gens. La particularité du jeu c'est, dans certains cas pas dans tous, ça rejouabilité. Et je pense que c'est là où la démarcation doit être faite. On a des jeux qui apportent du contenu qui ne se renouvelle pas automatiquement, c'est-à-dire qu'il y a besoin de la part des producteurs de créer le contenu pour qu'il puisse être consommé. Je pense que dans ces cas là on est dans une démarche particulièrement saine, qui te dire le contenu est créé au quotidien par une équipe et consommée au quotidien par des consommateurs. Ça me paraît particulièrement sain parce que on a défini une mécanique de jeu, on a défini un univers, une ambiance, exactement comme une série télé, et puis ensuite on décline le contenu et on essaye d'aller un petit peu plus loin, de donner plus de caractère, plus de personnalités, enrichir l'univers etc. Et puis il y a les autres types de jeu sur lesquels on a une mécanique qui se suffit à elle même et il y a pas besoin d'apporter plus de contenu. Donc j'aurais tendance à considérer que l'usage excessif du premier type de jeu ne peut pas vraiment exister ou en tout cas ne peut pas vraiment être différencié des autres médias. Ensuite quand on tombe sur des mécaniques de jeu qui sont qui se suffisent en elles-mêmes, il y a de toute façon au bout d'un moment une lassitude qui arrive. C'est-à-dire que le temps qui va être passé sur le jeu pourrait être considéré comme excessif si au sein d'une journée on passe trop de temps dessus, et puis au sein de la deuxième journée aussi, et puis au bout du compte on a joué 25 heures, et qu'en fait si on avait joué 25 heures sur trois mois ce serait pas du tout excessif, sauf que les 25 cas ont été passées sur trois jours, donc on ça fait trois fois huit heures par jour on pourrait considérer que c'est un usage excessif. Donc cette notion de de dilution de la consommation est très importante. Donc sur ces deux types de jeu j'aurais tendance à dire que oui on souhaite qu'il y ait un usage le plus important qui soit fait, mais pas forcément sur le plus court laps de temps. Parce que de toute façon on ne réussira pas à créer le contenu assez vite pour que les gens puissent le consommer, ou à partir du moment où on a crée quelque chose où il y a pas besoin de faire plus de contenu, ben de toute façon les gens vont passer en moyenne 25 heures dessus, donc qu'il les passe en 3 jours ou qu'ils les passent en trois mois, c'est pareil en fait.
: Moi je pense que cette distinction est un peu, enfin il faut faire attention, elle est un peu ambivalente, parce qu'il y a aussi au contraire des exemples de jeux, enfin comment dire, encore une fois je vais ré-injecter un petit peu de la sociologie de la légitimité culturelle, il y a aussi des jeux qui peuvent être d'une certaine manière moins perçus comme des Jeux proposant des usages excessifs, et qui pourtant sont très engageants et qui sont dans des dynamiques où le jeu se reconstitue. Je pense à un jeu en particulier mais Tetris en fait, qui est un des jeux vidéos les plus vieux qui existe. Je pense que les joueurs considèrent comme l'un des plus réussis de de l'histoire du jeu vidéo, qu'un jeu d'une simplicité absolue dans ses règles et dans son algorithme de base, qui a jamais été changé depuis encore une fois 25 ou 30 ans qu'il a été inventé, et qui pourtant autorise un nombre de de combinaisons, un nombre de parties extrêmement riche, et qui de ce point de vue là est très proche de ce qu'on valorise dans les échecs ou dans le jeu de go, et qui au contraire est un jeu qui aujourd'hui a une certaine légitimité, dans lequel il y a des gens qui s'entraînent. On a entendu parler de ça, alors je ne sais pas à quel point c'est vrai, mais des gens qui arrivent à résister une minute avec les yeux bandés sur une partie de Tetris en se repérant aux sons, c'est des gens qui s'entraînent pendant des mois pour arriver à faire des des exploits de de ce genre là, et ça va pas être, enfin encore une fois, je veux dire la différence entre des pratiques qui vont être considérées par le public comme étant excessives, et des pratiques qui au contraire vont être considérées comme étant des pratiques plutôt de l'ordre de l'exploit, est tout à fait liée au statut culturel dont dispose le jeu. Et je pense que dans Tetris on va dire que c'est de l'entraînement, on va dire que c'est du sport, on va dire que c'est un beau geste, que c'est un-un exploit, et pas que c'est quelque chose excessif. Alors que la même personne qui ferait ces choses là sur un jeu en ligne serait sans doute stigmatisée.
: Merci. Et puis une, pour changer un peu complètement et pour revenir sur l'excès finalement et le floutage des limites dont parlait Jean-Luc, c'est-à-dire je sais plus trop bien si je dois rester ou si je vais continuer ou si je dois m'arrêter, que dire finalement de ces moments dans lesquels on peut on peut se dire je dois prend une pause, qui pourraient venir des jeux eux-mêmes, ou des produits numériques eux-mêmes, ou de, c'est-à-dire on a parlé de cette limite de huit heures dans World of Warcraft je crois mais est-ce que ces principes ne pourrait pas être généralisée ou...
: Il y a des logiciels qui permettent de faire ça. Donc contrôle parental...
: Externe. externes. Ils sont évidemment toujours moins bien intégrés que quand ils sont faites directement par les concepteurs du jeu puisqu'ils vont pouvoir limiter à certaines fonctionnalités, par exemple quand j'ai dit la limite de huit heures de World of Warcraft, ça coupe pas, on peut encore jouer mais on n'a plus les récompenses. Donc voilà ça un logiciel par exemple pourrait pas le faire il faut que ce soit intégré au Jeu. Est-ce que ça peut être généralisé? Je pense que avant tout ce qui devrait être généralisé c'est le guide des bonnes pratiques de la limitation des usages excessifs auprès des concepteurs de jeux. Mais ce qui veut dire qu'il faut déjà aller au bout de ce qu'on en train de faire maintenant, définir ce que c'est qu'un usage excessif. Définir en quoi il est nocif cet usage excessif. Est-ce que l'excès veut obligatoirement introduire cette cette notion de dommages créés à la personne qui joue? Donc non je pense pas que ce soit généralisable, ou en tout cas ce qui est généralisable l'a déjà été. Et est disponible.
: Ce qui pourrait quand même être, moi c'est la proposition que j'ai envie de faire, c'est que une limitation externe c'est pas très supportable, en revanche une auto limitation que se donne le joueur au début, et qui lui est rappelée au moment où il arrive à cette limite, après il en fait ce qu'il veut mais au moins on lui rappelle. Vous aviez décidé que vous joueriez pendant tant de temps, vous y êtes. A vous de voir. C'est quelque chose qui d'un point de vue je dirais, aussi bien éthique que de justement de la mécanique des prises de décisions, à mon sens trouverait son sens sans être une intrusion ou une emprise sur le joueur.
: L'idée paraît très bonne mais n'est pas du tout applicable à un jeu. Elle est applicable à l'ensemble des jeux. C'est-à-dire qu'il faut poser cette question combien de temps voulez -vous consacrer aux jeux vidéo cette semaine, à la télévision cette semaine, à l'usage internet récréatif, à la sociabilisation uniquement numérique et pas en contact en face à face? Donc voilà là dans ces cas là oui effectivement ça pourrait avoir un intérêt j'imagine tout à fait des applications mobiles qui pourraient, dans lequel on pourrait dire tiens cette application là c'est de l'usage social, cette application là c'est du jeu etc. et puis bah "monitorer" automatiquement le temps d'usage de chacune des applications, et envoyer des notifications aux utilisateurs pour dire bah ça y a tu as atteint les objectifs que tu t'étais fixés, au moins sur la partie sociabilisation récréative via internet. Donc ça paraît pas idiot mais ça ne me paraît pas non plus applicable à un jeu. On pourrait pas dire à pas que un concepteur de jeux vient dire tiens moi je vais intégrer cette notion à mon jeu. Bah encore une fois pourquoi est-ce qu'un jeu devrait dire moi je limite alors que les autres usages qui pourraient être à excès aussi eux ne imiteraient pas. Je pense que on pourrait dire, et en plus je crée une grosse catégorie globale de l'usage de mon smartphone, je veux pas mon smartphone plus de quatre heures par jour.
: Si je peux dire un mot de conclusion là dessus, il faut aussi considérer l'alternative, c'est-à-dire l'offre d'alternative, de pratique alternative et de loisir alternatif. Je veux dire il faut arrêter je pense de, enfin il ne faut pas donner un pouvoir magique en gros aux jeux vidéos ou aux objets technologiques en gros, qui serait celui de capter une attention qui sinon irait naturellement vers des pratiques beaucoup plus épanouissantes et bien meilleures pour les individus. Il faut aussi penser quelle est l'offre de ces pratiques là? Quelle est l'offre alternative? Qu'est-ce qu'on propose d'autre? Qu'est-ce qui fait plaisir ailleurs et je pense que c'est pas suffisamment considéré et notamment que les milieux sociaux dans lesquels sont pris, les contextes sociaux dans lesquels sont pris les joueurs, n'est pas suffisamment considéré par les gens qui critiquent l'usage excessif des jeux vidéo.
: Le micro ne marchait pas j'espère que... enfin ou ne marchait pas très bien. Bon sur ces bonnes paroles et sur ce débat relancé on va s'arrêter et remercier merci encore une fois les auditeurs, et puis dire la semaine prochaine. Merci.